Megavalanche – Reunion

point-de-vu-du-maidoMégavalanche à la Réunion !

La Mégavalanche, c’est quoi ?

La Mégavalanche est une épreuve mythique de vélo tout-terrain, organisée chaque début d’été austral depuis 1995 sur l’île de La Réunion. Il s’agit d’une descente marathon avec un départ en masse (mass-start) depuis le sommet du Maïdo, à 2400 m d’altitude, jusqu’à Saint-Paul.
Épreuve pionnière de la discipline, elle a inspiré la création de l’enduro, tout en restant une référence pour les amateurs de sensations fortes.


Les qualifications

Depuis 2012, à la suite des grands incendies du Maïdo (causés par un pyromane), le format de qualification a évolué : adieu la mass-start, place à un format enduro. Les coureurs s’affrontent sur trois spéciales chronométrées, permettant de répartir les participants :

  • Les 70/80 premiers (selon le nombre total de participants) se qualifient pour la « Méga ».
  • Les suivants participent à la « Méga Challenger ».
  • Les derniers sont en « Méga Amateur ».

Depuis 2020, il est également possible de participer uniquement à la course finale du dimanche.


Déroulement des spéciales

Spéciale 1 : La forêt piégeuse

La première spéciale est la plus longue (plus de 10 minutes de descente) et la plus technique. Très physique, elle est un véritable carnage si le sol est humide, avec ses racines imposantes et son terrain souvent glissant. Elle peut être décomposée en plusieurs parties :

  • Partie 1 : Sur la roche volcanique, avec des crevasses et des passages rocailleux.
  • Partie 2 : Ultra-rapide, mais périlleuse, avec des crevasses et racines en embuscade.
  • Partie 3 : Une relance intense sur un faux plat, avant de plonger dans la forêt humide et ses pièges racinaires.
  • Partie finale : Un enchaînement de murs et un champ de racines à haute vitesse.

C’est la spéciale que je redoute le plus. Les trajectoires peuvent être prises de multiples façons, offrant des opportunités aux plus créatifs… ou des erreurs coûteuses. La moindre humidité transforme ce tracé en patinoire.


Spéciale 2 : Fast as f* !**

À travers les champs de canne à sucre, cette spéciale est une ode à la vitesse pure. Ici, c’est pédaler ou mourir. Si le terrain est humide, la terre devient glissante comme du miroir, ajoutant un risque supplémentaire dans les virages relevés. C’est une spéciale très cardio, où il faut constamment relancer pour maintenir le rythme.


Spéciale 3 : L’enfer de la savane

La dernière spéciale est redoutable : chaleur étouffante, poussière, cailloux et murets à franchir. Ici, les roues et le matériel souffrent, et les crevaisons ou casses sont fréquentes. Le point clé est une marche technique, suivie d’une relance exigeante. Cette section demande puissance et concentration, mais aussi une gestion intelligente de l’effort.


Mon expérience

Avant la course
Nous arrivons avec ma sœur bien à l’heure. Une fois n’est pas coutume, j’ai même le luxe d’écouter les dernières consignes et de discuter avec des amis. L’ambiance est détendue, les vélos des participants attirent le regard : Cube, Commençal, Santa Cruz, Orbea, Yeti…

Les départs se font trois par trois. Avec ma plaque 137, je suis accompagné des concurrents 136 et 139. Après une discussion pour organiser nos départs, nous convenons de laisser partir en premier le plus expérimenté, suivi de moi, puis du débutant.


Spéciale 1 : Premier test
Le départ est donné. Mon « lièvre » démarre à toute vitesse, et je peine à suivre. Je prends un virage trop large et perds l’avant sur une dalle pentue. Je repars, seul, essayant de rattraper mon retard. Je pousse fort sur les relances, enchaîne les racines et gère les sections techniques tant bien que mal.

À mi-parcours, je double quelques coureurs en difficulté. Dans la dernière ligne droite, je me fais surprendre par une racine humide et percute un arbre. Je repars frustré, mais sans dégâts. Résultat : 13 minutes. Beaucoup trop à mon goût, surtout sur un terrain sec.


Spéciale 2 : À fond les manettes
Après une liaison de 15 minutes, place à la spéciale la plus rapide du jour. Ici, pas de stratégie, il faut pédaler sans relâche. Je m’élance en position aérodynamique, poussant mon vélo au maximum. Malgré quelques passages tendus, tout se passe bien. Je termine en 4 minutes 4 secondes, satisfait mais conscient que je peux encore gratter quelques précieuses secondes.


Spéciale 3 : L’enfer final
La chaleur de la savane se fait sentir dès la liaison. Je vide ma gourde avant le départ pour éviter toute sensation de soif. Une fois lancé, je me concentre sur le flow, cherchant à éviter les pièges du terrain. Les roches, murets et épines défilent. Je rattrape un concurrent qui me laisse gentiment passer, avant de franchir la fameuse marche technique.

Les derniers pif-pafs sont intenses, mais je garde le contrôle. Je termine la spéciale sans chute, en sueur mais satisfait de ma performance sous la barre des 5 minutes.


Conclusion des qualifs

Ces qualifications ont été exigeantes, mais je suis content de m’être donné à fond. Je termine 36e sur 199, progressant par rapport à l’an dernier. Je partirai cette fois en ligne D pour la finale.
Malgré des conditions idéales, la concurrence était rude, mais je sais où je peux m’améliorer. Rendez-vous pour la course finale, prêt à tout donner !


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Après une bonne qualification, je suis, comme l’an dernier, dans le sas Mégavalanche avec les 70 meilleurs. Je suis en ligne D à 2 mètres d’Hugo Pigeon, Alex Rudeau… À côté de moi, j’ai aussi du lourd : Léo Abella, Florent Payet… La météo est clémente, le soleil bien présent, aucun nuage à l’horizon, pas de pluie depuis 4 jours. C’est sec, ça va donc rouler « fort » par rapport à l’an dernier.

L’ambiance est solennelle et festive à la fois. Je m’échauffe tranquillement, d’abord les jambes avec des sauts de grenouille, puis les bras avec deux-trois pompes et étirements. Je pars faire quelques pompes et deux-trois accélérations, histoire de m’habituer un peu à l’altitude. Le vélo ne fait aucun bruit, tout est OK pour ne rien casser. Si vous saviez le nombre de casses au départ, c’est juste impressionnant. 

C’est mon 16ᵉ départ d’une Mégavalanche : 11 à La Réunion, 2 à Huez et 3 sur des Maxiavalanche. Mon constat : le niveau est de plus en plus élevé, et ce n’est pas une perception de l’esprit, c’est un fait. Les écarts avec les pros sont « minimes », que ce soit à Huez ou ici. On est loin des 5 minutes d’écart d’autrefois.

L’appel
L’appel va commencer dans l’ordre croissant des qualifications. D’abord ceux en ligne A, puis B, puis C, puis ma ligne D… Je me place dans mon sas. Tout se remplit. Nous sommes à 10 minutes du départ, il y a un rappel des consignes, les derniers pipis, les derniers petits réglages, derniers ajustements des tenues de combat. Cette fois, la tension est palpable.

C’est l’heure de la mythique musique Alarma, les sonneries de GoPro se mettent en place. Je prends une profonde inspiration, j’ai l’espoir qu’il n’y aura pas de chute…

Le départ
Le cordon s’abaisse : go, go, go, go, go ! Je pédale aussi bien que je peux pour me placer correctement. Premier virage, je prends l’inter et je bombarde comme un porc pour me positionner dans le goulet de lave. Je suis heureux. Il y a une chute sur le flanc gauche au départ, et j’ai réussi à me faufiler tranquillement. J’aperçois le maillot blanc arc-en-ciel de Rudeau en tête de course. Devant, il doit y avoir 10 types, et juste devant moi, le grand Payet.

Les laves
Nous sortons des laves tout en puissance. Je passe mes vitesses une par une histoire de ne pas fragiliser/vriller/casser ma chaîne. Payet est out, il a cassé la sienne, eheh, une place de gagnée. Je suis incroyablement surpris de comment je grimpe bien la petite côte avant de basculer dans les dalles de lave. Je suis en bonne position, mais c’est aussi une grosse pression pour moi, et cela pour plusieurs raisons : derrière, ça pousse, et je n’aime pas les laves.

Me voilà en difficulté. Un type me double, puis un autre. Je suis pourtant à fond, mais… je freine !!! Je n’ai que des mauvaises lignes et je me fais doubler de partout. Je perds bien une dizaine de places aisément. Je jure au moins 3 fois. Heureusement, c’est bientôt fini. Je lâche les freins sur la dernière partie des laves et je double un concurrent avant de plonger dans le sous-bois .

Les crêtes
Difficile de doubler ici à moins d’être bon en trial. C’est un single avec des petits coups de cul, c’est ultra cardio. Nous sommes encore à 2200 m d’altitude. C’est ici que tu sais si tu as de la caisse ou pas, mais ce n’est pas ici que la course se joue. Cependant, c’est ici que l’écart avec les premiers va se creuser si ça n’avance pas.

J’ai de la chance, je me suis entraîné spécialement pour ce genre de segments. Je m’en sors très bien et j’arrive, malgré moi et surtout sur le coup de cul, à doubler 5 candidats à ce moment de la course. Je ne le sais pas encore, mais je suis top 15 😉

La fin des crêtes me sera fatale. J’ai la sale habitude de rouler sans masque sur les longues courses. La poussière générée par la très haute vitesse dans la dernière partie du sous-bois me gêne amèrement, je cligne des yeux et je n’en ai même plus qu’un ahah. Pas d’excuse, on y va. Le vélo prend de la vitesse tout seul et le zéro backplate gomme absolument tout. Je suis grave avantagé, ça va tellement vite que je loupe mon virage !! Je perds pas loin de 13 places. J’ai dû laisser passer pour ne pas risquer de percuter un concurrent en me remettant dans la trace dans cette partie. Je suis dégoûté, j’angoisse, je stresse. Rien ne va, je perds le contrôle. Je respire à grand bruit pour me calmer. J’attaque le sentier « Tête dure ».

Tête dure
C’est un sentier technique avec poussière, racines, feuilles de tamarin et des gros cailloux. Les meilleurs passent ici en 1 minute 6 secondes, je passerai le jour de la course en 1 minute et 12 secondes (ce qui sera mon record absolu). J’appréhende, avec la vitesse du jour, le saut avant l’arbre. In fine, par rapport à l’an dernier et avec les conditions météo, tout se passe bien. Deux malheureux concurrents auront moins de chance (roue percée).

Louis Émile
La partie redoutée par tout le monde, c’est la « jungle ». C’est un single avec des murs, des racines. Il est long, physique, éprouvant, tout en sous-bois et donc forcément humide à un moment. Ils ont modifié le tracé à plusieurs reprises.

Je n’ai personne devant moi, ce qui me stresse un peu. Je décide mentalement de me persuader de ne pas freiner et de rouler en bourrin (relance). L’exercice est risqué, car je risque de me griller physiquement. Mais pas le choix, j’ai fait 11 000 km pour cette course mythique. Mes efforts paient au prix d’un lourd tribut physique, je raccroche la file indienne des riders. Heureux, je tente de passer là où je peux, quitte à faire des blocs pass à mon concurrent. Je gratte 2 places dans la partie boueuse/humide. En tout, j’ai doublé ici 5 concurrents (3 étaient en casse mécanique).

Bike Park
Fin de Louis Émile, c’est l’heure d’attaquer une petite portion de route où j’aperçois 3 candidats en difficulté sur le pédalage. Je décide de les prendre rapidement avant d’attaquer le bike park. Je réussis à couler les 3 et à rattraper un 4ᵉ que j’ai eu du mal à doubler. J’ai bénéficié de deux encouragements sur le bord de la piste, je ne sais pas de qui il s’agit, mais merci .

Cette partie bike park est difficile, car il y a beaucoup de relances. Le concurrent devant moi, que je connais, est en difficulté. Je l’encourage avec mes « Allez, allez, allez, c’est Valère, largue pas, dalon ! ». « Go, go, go, go ! », rien n’y fait, il se résigne à me laisser passer. J’en profite pour relancer de partout et rattraper ce que je peux.

Malheureusement pour moi, je vais être en difficulté dans une partie que je déteste et où d’ailleurs Alex Rudeau a chuté. Pour une raison que j’ignore, je n’ai JAMAIS été à l’aise ici, pourtant les conditions étaient optimales, c’était sec. Cette partie du bike park se nomme « Toboggan », car toujours glissante. Mais là, zéro, j’ai joué la carte safe as fuck. Deux types me rattrapent et me mettent la pression, je passe tout en bourrin. Cette fois, c’est mon pote de tout à l’heure qui m’encourage.

C’est bientôt fini, je ne me laisse pas doubler, car je sais que je vais reprendre de la vitesse en fin de parcours dans les cannes à sucre, et ça ne manquera pas : j’atteins mon record de course en vitesse avec 89 km/h. Mon pote me dira que j’avançais tout seul dans le défoncé de cette portion de cannes à sucre. À noter que c’est ici que Cédric Gracia a failli mourir.

Féoga – Road Mountainbike

Cette fois, la course est quasi faite, c’est ici que tout va se jouer pour moi, c’est triste, mais c’est ainsi. Après la partie bike park, la partie « route », un faux plat. J’ai encore du jus et s’il y a bien un endroit où il faut l’utiliser, c’est ici. J’aperçois 7 concurrents, que je double tout le long. Aucune pause pour moi. Même pas dans la petite descente où je continue de pédaler. Je fais le tout aussi vite qu’en vélo de route avec une moyenne de 28 km/h, ce qui sera mon record. Merci le plateau de 34 dents.

Parapente

Ici, nous nous sommes tirés la bourre avec le concurrent 20. Je le suis tranquillement sans forcer. Je me dis que je vais récupérer et en profiter sur la route et la partie. Mais en fait, non, je l’ai doublé dans le parapente, à ma grande surprise. Du coup, pas question qu’il me rattrape, je fais en sorte de pédaler sur la dernière portion de route. Il reste dans ma roue et bénéficie de mon aéro. Dernier faux plat avant le pierrier, je suis cuit, il me double à l’intérieur dans le virage pour couler dans le pierrier

Le Pierrier
Nous nous suivons dans le pierrier. De la poussière est présente, des concurrents sont proches. Il a dû le voir/sentir aussi, car il a accéléré dans le pierrier. J’ai un peu de mal à suivre, car il freine dans chaque virage en dérapant et soulève de la poussière. C’est volontaire de sa part. Nous tapons les pierres, je m’aperçois que je suis un peu plus rapide que lui dans le pierrier, je me suis dit que j’allais tenter un truc dans un dernier élan de combativité. Ce que je ferai au virage 7 du pierrier. Je lui ai fait un vilain bloc pass avec mon intérieur, ce qui se soldera par un juron de sa part. Tant pis, c’est la race. Je continue à pédaler, je perçois le wagon de 4 concurrents à la queue leu leu, nous les avons rattrapés, mais ça sera impossible de les doubler. Il y a beaucoup de poussière, je loupe le dernier virage, mon concurrent numéro 20 me redouble. Un type sur le côté de la piste nous dit que nous sommes 20ᵉ. Je me dis que mon objectif est rempli, j’abandonne la combativité et je roule safe dans sa roue. De toute manière, il n’était quasi plus possible de doubler à cet endroit sans risquer une casse matérielle. J’ai le sourire.

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52 minutes d’effort récompensées par une 21ᵉ place. Je vais saluer mon adversaire du jour en lui disant « belle bataille, merci », il ne m’a pas regardé ni salué… tant pis. Mon pote David m’aperçoit et me prend dans ses bras chaleureusement et me dira « belle bataille mon gars, tu étais bien placé au départ, je t’ai vu dans le virage, tu t’es loupé ».

Je prends mon coca, mes bonbons Haribos, ma sœur m’aperçoit, me prend en photo pour maman et papa, et nous partons.

Valére

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